Enquête/ Accident de la circulation à Abidjan
Qui
vole les biens des blessés ?
Ça donne froid dans le
dos. Touré Ismaël est victime d’un accident de la circulation juste après le 3ème
pont de Yopougon, à proximité du carrefour du Centre hospitalier universitaire(Chu).
A bord de sa camionnette de livraison de
marchandises diverses, il a été percuté par un autre véhicule de transport en
commun communément appelé "gbaka".
Il est 20 heures ce 21 septembre. Une horde de bambins se rue vers le
lieu du sinistre. Alertés, les sapeurs-pompiers militaires tardent à venir.
Pendant ce temps, la foule composée de curieux et de badauds grossit. C’est la
cohue. «J’ai pu sortir du véhicule. Un groupe de jeunes gens s’est dirigé vers
moi. Ils m’ont demandé de me coucher sur le bitume car je saignais abondamment.
J’étais presqu’inconscient, mais j’ai pu voir les jeunes gens se diriger vers
ma fourgonnette. Ils ont commencé à fouiller le véhicule. J’avais 1,5 million
Fcfa emballés dans un sachet. L’argent se trouvait dans la boîte à gant »,
explique le jeune conducteur. Selon lui, trente minutes après l’arrivée des
sapeurs-pompiers, il a été transporté au Chu de Yopougon. La foule se disperse
avant son évacuation. «J’ai indiqué aux secouristes que j’avais de l’argent à
l’intérieur du véhicule. Après une fouille, le pompier est venu me dire qu’il
n’avait rien trouvé. C’est seulement mon téléphone portable que j’ai pu
récupérer auprès du service constat lorsque je suis sorti de l’hôpital», ajoute
notre interlocuteur qui a déposé une plainte contre x au commissariat de police
du 16ème arrondissement. L’enquête est en cours et les présumés
suspects continuent de courir. Comme un
effet de mode, deux jours après cet accident, une autre collision impliquant un
camion semi-remorque (immatriculé 5722EG01) et un véhicule de transport en
commun de marque Mercédès et de type Massa (immatriculé 1749CN0) fait quinze
blessés graves. Nous sommes au pk 17, sur l’autoroute du Nord. Parmi les victimes figurent Gnamien Maxime et
Fofana Youssouf. Ils confient qu’après
avoir reçu les premiers soins grâce à la promptitude des sapeurs-pompiers
militaires de la caserne de Yopougon, ils ont été évacués au Chu de Cocody.
Selon les blessés, leurs téléphones portables de marque Samsung et de type
"Galaxy" et des numéraires ont été enregistrés par les soldats du feu
avant leur transfert à l’hôpital. «Ils nous ont dit que nos biens ont été remis
aux agents du service constat de la préfecture de police. A la sortie de
l’hôpital, on s’est rendus là-bas. Mais nous n’avons pas pu rentrer en
possession de nos biens. Cela fait presqu’un mois que nous faisons des
va-et-vient sans obtenir gain de cause», fulminent-ils en chœur.
Les
victimes dépouillées de leurs biens
Autre lieu, même scène.
Le 28 septembre, un accident mortel se produit sur le boulevard Valéry Giscard
Estaing à proximité d’un hôtel bien connu à Marcory. Un agent des douanes, en
route pour l’aéroport Félix Houphouet-Boigny de Port-Bouët, a été tué sur le
coup. Son corps est incarcéré dans sa voiture. La collision s’est produite avec
un véhicule de transport en commun (504)
en provenance de Grand-Bassam. Comme des abeilles attirées par le miel,
des jeunes gens s’agglutinent autour des véhicules. « Nous sommes arrivés
sur le lieu. On a vu que les autres victimes étaient hors de la voiture de
transport en commun. Il y avait des gens aux alentours. Des victimes
conscientes, avant leur évacuation, nous ont dit qu’elles avaient leurs
téléphones portables et d’autres objets tels que des bijoux et de l’argent dans
leurs sacs. Séance tenante, on a fouillé les bagages mais on n’a pas retrouvé
les biens déclarés. Lorsque les agents du service constat sont arrivés, nous
leur avons rendu compte de la situation. Mais nous soupçonnons les premières
personnes qui se sont ruées sur le lieu et qui ont fait sortir les blessés du
véhicule», accuse Fofana Moussa, secouriste-bénévole. Selon le président de la
Mission scientifique des droits de l'Homme et du travail (Msdht), le risque de
vols de biens des victimes est élevé lorsque les sapeurs-pompiers et les agents
du service constat n’arrivent pas dans les minutes qui suivent l’accident pour
sécuriser le théâtre du sinistre. «En tout état de cause, nous prenons la peine
d'enregistrer tous les biens déclarés. Nous remettons tous les objets au
service constat qui gère la procédure de récupération. Nous, on s'en fout des
biens des victimes. Nous intervenons pour secourir les gens dont la vie est en
danger », assure-t-il. Du côté du Groupement des sapeurs-pompiers
militaires (Gspm), les soldats du feu répètent qu’ils sont attachés à leur
devise : "Sauver ou périr". «Notre mission essentielle et
primordiale est de sauver les vies humaines en danger. Nous remettons la
liste des biens déclarés par les victimes au service constat avant évacuation.
Le reste, ce n’est pas notre affaire », insiste l’adjudant-chef Kouassi
Blaise, officier de permanence au Centre de coordination et transmission des
opérations (Ccto) du Gspm.
Ouattara
Moussa
Les secours doivent être plus réactifs pour sauver les victimes et sécuriser
leurs biens.
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