Blocage des
allocations à l’université de Bordeaux (France)
Des
étudiants ivoiriens se révoltent contre la direction des bourses
Les étudiants ivoiriens de l’université Bordeaux I
(France) dénoncent le blocage de leurs allocations dont la direction des bourses
d’Abidjan serait à l’origine.
Plus
rien ne va. Le torchon brûle entre la direction des bourses du ministère de l’Enseignement
supérieur et de la recherche scientifique et les étudiants ivoiriens de
l’université Bordeaux I (France). Ils crient leur ras-le-bol face aux dérives
constatées dans l’octroi des aides financières. Ces étudiants de l’Hexagone
accusent le directeur des bourses et
son équipe des faits de «racket, de complaisance et d’opacité» dans
l’attribution des bourses d’études hors de la Côte d’Ivoire. Selon le président
de l’Association des élèves, étudiants et stagiaires en Gironde (Aeesig-France)
et ses camarades qui nous ont joints, le 13 novembre, par téléphone, il existe
un flou autour des conditions d’allocation des bourses au titre de l’année
académique 2012-2013. Au dire du président de ce mouvement, les règles établies
(consultez le site internet de la direction des bourses) n’ont pas été respectées
par le directeur des bourses du ministère de l’Enseignement supérieur et de la
recherche scientifique. A en croire Dramane Ouattara, étudiant doctorant en
informatique (e-santé) à l'université Bordeaux, ses camarades et lui ont tiré
la sonnette d’alarme à travers un rapport transmis en avril à Charles Gomis, ambassadeur de Côte
d’Ivoire en France. « (…) A
chaque fois que j'ai eu la direction des bourses à Abidjan, en son temps, au
téléphone, l'on me disait que le document était en cours et cela depuis avril
2013. Alors, c'est dans ce contexte que lors d'une rencontre avec
l'ambassadeur, je lui ai fait part des difficultés des étudiants pour avoir
leurs bourses. L’ambassadeur m'a demandé de lui adresser un état de la
situation. Ce que j'ai fait à travers un
rapport pour décrier le manque de transparence, le non-respect des règles. Pis,
les cas de racket sont légion. La sous-directrice des bourses a indiqué à
certains de nos camarades que s’ils veulent obtenir la bourse d’étude et figurez
sur la liste des bénéficiaires, alors ils doivent être prêts à donner de
l’argent», nous a confié le président de l’Aeesig-France dans le rapport dont
nous avons reçu copie. Pour lui, il n’en fallait pas plus pour que leur
situation se complique davantage. «C'est ce document, une fois dans les
mains de la direction des bourses, qui a suscité toute la colère de cette
direction qui a décidé de ne plus régler les problèmes de bourses »,
a-t-il soutenu.
«Il y a plusieurs étudiants dans ce cas. C’est
révoltant»
Puis d’ajouter :
«En Octobre, profitant de ma participation comme conférencier au Symposium sur
la cyber-santé organisé par l'ordre des médecins de Côte d'Ivoire, je suis allé
à la rencontre de la direction des bourses pour discuter du problème. Madame
Coulibaly, sous directrice des bourses m’a exhorté à aller demander pardon au directeur
des bourses pour avoir rédigé ce rapport ; seule alternative pour régler
le problème. Ce que j'ai refusé. Et elle est allée jusqu'à m'enfermer
dans son bureau avec ses collègues, m'empêchant de quitter les lieux. C'est une
tentative d'intimidation que je considère inacceptable.»
En
sus, les étudiants ivoiriens des différentes universités de Bordeaux (Gironde)
décrient l’opacité du système et surtout le manque d’information. «Nous nous posons la question de savoir s’il
y a une vraie coordination des actions et un vrai partage d’information entre
la direction des bourses à Abidjan et le service des bourses de l’ambassade. Il
est inadmissible qu’un étudiant qui dépose une première demande de bourse et à
qui la commission d’attribution décide d’octroyer cette bourse ne puisse pas
être informé malgré son dossier de demande constitué de son adresse mail, de
l’adresse de son université, de son numéro de téléphone portable. Le comble,
finalement on décide de l’annulation de cette bourse sous prétexte que
l’étudiant ne s’est jamais manifesté. Il y a plusieurs étudiants dans ce cas.
C’est révoltant», ont fulminé Soro
Allaman, étudiant en master d’économie à
l'université Bordeaux 4, Tokpa Rose de l'université Bordeaux 3, Gomi Charline à Pigier Bordeaux et Kouakou David à l'université Bordeaux 3,
doctorant en droit. Pour Adouko Bernard, doctorant en droit à l'université
Bordeaux 3, Ouattara Zanga, doctorant en géographie dans la même université,
Nouaman Marcellin en médecine à l'université Bordeaux 2, et Cissé Moustapha en économie
à l'université Bordeaux 4, le système actuel d’attribution des
bourses d’étude n’est pas adapté. De leur avis, il est temps comme « cela
est prôné par le président de la République et son gouvernement » que les
plus méritants soient les étudiants qui bénéficient véritablement d’une bourse
d’étude. Nos interlocuteurs souhaitent que l’on ne puisse plus « assister
ni accepter » des listes de boursiers officielles et des listes de
boursiers non-officielles.
«Il est temps
aussi qu’un étudiant non satisfait du traitement de son dossier et de la suite donnée à sa requête puisse avoir la
possibilité de recours et que l’on puisse lui expliquer clairement ce qui a
milité en sa défaveur par rapport à un autre étudiant. Il est temps également
qu’on ne soit plus obligé de connaître une personne travaillant à la direction
des bourses pour espérer être informé de la situation. Il faut que
l’information soit partagée et que les canaux soient multipliés afin que les
étudiants soient mieux informés. Il ne doit plus avoir d’annulation de la
bourse d’un étudiant par manque d’information. Il est temps enfin de créer les
conditions d’une confiance entre les structures chargées de la gestion des
bourses et les étudiants et cela passe par une transparence totale du système »,
a recommandé Dramane Ouattara, président de l’Aeesig-France.
La cacophonie entre le ministère et la direction
des bourses
Face aux
récriminations formulées, nous nous sommes rendus le 18 novembre successivement
au cabinet de Cissé Bacongo, à la tour C, 20ème étage et à la direction des bourses sise à l’immeuble
Noguès. Selon le service de communication du ministre, il n’existe pas de
problème de blocage de bourses et le premier responsable de ce département
ministériel n’a pas reçu de rapport dénonçant des dysfonctionnements dans
l’attribution des aides financières aux étudiants ivoiriens vivant dans
l’Hexagone. « Le ministre était en septembre à Paris (France). Il a eu une
rencontre avec les étudiants le 24 septembre à l’ambassade. Tous les problèmes
liés au retard de paiement des bourses ont été réglés. Le ministre n’a pas reçu
de rapport », ont soutenu en chœur Dominique Ouandjé et Mme Amélie Lohouès.
Un autre son de cloche est sorti de l’immeuble Noguès.
Selon Seidou
Diaby, directeur des bourses d'étude qui avait à ses côtés Mme Coulibaly Barro
Kadidaitou, sous-directrice des bourses hors Côte d'Ivoire, et Oka Yao Raymond,
sous-directeur des bourses en Côte d'Ivoire,
le ministre a bel et bien reçu le fameux document. «Le ministre est le
président de la commission. Il a été saisi. Il a reçu le rapport. C'est lui-même
qui nous a transmis le rapport. Il a pris connaissance de ce rapport », a
affirmé M. Diaby. Lors des échanges, Mme Coulibaly Barro Kadidiatou a nié en
bloc les faits de séquestration du président de l’Aeesig. « Je n'ai pas la
tête de quelqu'un qui peut séquestrer un homme. Quand vous me regardez, est-ce
que je ressemble à quelqu’un qui peut faire ça ? Je lui ai demandé
pourquoi il va écrire à l'ambassadeur pour un problème qu'on peut résoudre.
Nous sommes-là. Ils auraient pu venir pour qu'on parle et trouver une
solution », s’est-elle défendue. «Nous travaillons de façon transparente.
Ce sont des problèmes qui vont se régler», a indiqué M. Diaby sur un ton
conciliant.
Ouattara Moussa
Lég : Dramane Ouattara et ses camarades
réclament le paiement de leurs bourses.
Photos : DR
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