Enquête/ Accidents meurtriers sur l’autoroute du
nord
Voici pourquoi les ‘’Massa’’ tuent
Depuis l’ouverture officielle de l’autoroute du nord, le 11 décembre, il
ne se passe plus de jour sans que l’on
n’enregistre des accidents meurtriers. Selon le Centre de coordination des
transmissions et des opérations des sapeurs-pompiers, les minicars communément appelés ‘’Massa’’
sont impliqués dans ces sinistres, dans plus de 80% des cas. Nous avons enquêté
sur les causes profondes de ces accidents répétés.
Mme Kouamé Irène tient en main un chapelet blanc.
La dame se dirige au guichet de la gare pour prendre son titre de transport. Elle
tend un billet de 10.000 FCfa au guichetier assis derrière la guérite. C’est
une maisonnée située au rez-de-chaussée d’un immeuble R+1. Le caissier lui
donne un bout de papier puis lui remet un billet de 5000 FCfa en guise de
monnaie. Aidée par un jeune ‘’gnambolo’’ (chargeur) qui tient son sac, elle se
dirige vers le véhicule de marque Mercédès, type Sprinter communément appelé ‘’Massa’’
(roi, en langue malinké), stationné en bordure de la chaussée. Ce 27 janvier
2013, l’ancienne gare routière d’Adjamé, en face de l’imposant bâtiment
abritant l’église du roi universel, grouille de monde. Il est 8 heures 30
minutes. Des jeunes gens hèlent les clients. "Bouaké !
Bouaké !", crient-ils à tue-tête. Certains se ruent vers les passants
pour leur proposer leur service. Pendant ce temps, la jeune femme se faufile
entre la horde de jeunes gens. Elle prend place à la deuxième rangée du
véhicule. La voyageuse, le chapelet en main, insiste pour qu’un jeune chargeur
tenant en main ses deux sacs les range soigneusement sous son siège. Ce qui est
fait. Rassurée, elle continue d’égrener l’objet de dévotion, en murmurant des
paroles. «Je prie Dieu pour qu’il me protège, tout au long de mon voyage. Les accidents sont nombreux sur l’autoroute
du nord. Donc, je prie et je vais continuer de prier jusqu’à ce j’arrive à
destination », nous confie l’institutrice en service à Bouaké. Elle a
bénéficié d’une permission pour se rendre à la capitale économique, afin
d’honorer un rendez-vous médical. Selon ses dires, le vendredi, 24 janvier,
alors qu’elle venait à Abidjan à bord d’un autre minicar, elle est arrivée deux
heures après le grave accident de la circulation qui s’est déroulé au PK 42, vers
9 heures 30 minutes sur l’autoroute du nord. Ce jour-là, un véhicule de type
Massa de 18 places a percuté un car de 70 places. Treize passagers sont morts
sur le coup. Certes, la voyageuse déplore le drame, mais elle s’en remet au
ciel. «C’est triste! C’est Dieu qui a voulu, on n’y peut rien. C’est la volonté
de Dieu», s’afflige-t-elle. Néanmoins, elle explique ce qui l’a motivée à
emprunter ce moyen de transport. « Il est vrai que les véhicules de type
Massa sont impliqués dans beaucoup d’accidents. Cependant, ce sont des moyens
de transport rapide et à moindre coût», assure l’enseignante. Pendant ce temps,
le véhicule se remplit progressivement de passagers. Aux alentours de la gare,
des vendeuses d’eau, de pains et d’articles divers déambulent entre la foule.
Elles vendent à la criée leurs marchandises. La gare s’anime. Dans
l’arrière-cour, on assiste à un incessant ballet d’aller et retour de jeunes
gens. Il suffit d’y faire un tour pour constater qu’il y a en ce lieu, un bistrot et un kiosque à café. Une femme
est assise sur une chaise. Devant elle, l’on aperçoit des sachets de liqueur,
des bouteilles de "gin’s" et des comprimés déposés sur deux
tablettes. La vendeuse est entourée d’un groupe de jeunes. Les sachets de liqueurs font comme des
petits pains. Ça coûte 100 FCfa. Très excité, Traoré Souleymane achète trois
sachets. Il remet 300 FCfa à la commerçante. D’un trait, il ingurgite l’alcool,
puis il sort de la cour en courant. Il fonce vers un véhicule de type Massa
dont le moteur vrombit depuis quelques minutes. Nous tentons de le rattraper
«Monsieur je suis pressé. Je vais à Bouaké. Je suis chargé. C’est une affaire
"kabakaba (rapide, ndlr)". J’ai pris ma dose pour tenir», lance-t-il.
Souleymane saute dans la voiture, démarre en trompe pour disparaître. De
l’autre côté de la route, l’on aperçoit une autre gare routière. Elle dessert
la ligne Abidjan-Gagnoa. Elle est située à proximité de l’espace dénommée
"Gbêba". Coulibaly Issa est
l’un des derniers passagers à prendre le ticket. Cependant, il nous accorde
quelques minutes pour échanger. Il livre régulièrement des produits
phytosanitaires aux planteurs de cacao, à travers les campements de la région
du Gôh. «Je prends le Massa car c’est moins cher. Ça charge vite. On ne perd
pas le temps. Moi, je préfère ces véhicules parce qu’ils sont rapides et
pratiques. Ce n’est pas le cas avec les
cars», explique-t-il. Le commerçant minimise le risque des sinistres impliquant
les conducteurs de ces minicars. «Les accidents peuvent arriver à tout moment.
Moi, je crois au destin. Vous pouvez prendre toutes les mesures possibles.
Toutefois, les choses peuvent se dérouler autrement. Je vois souvent des
accidents de la circulation où des véhicules de transport sont impliqués pour
des défaillances techniques», reconnaît-il, avant de s’engouffrer dans
l’automobile. C’est la peur au ventre que Kouamé Kouadio Pascal effectue son
voyage. Il se rend au chevet de son oncle à Duékoué. Selon lui, les difficultés
financières qu’il traverse, à ce moment, le contraignent à emprunter un moyen
de transport, à coût réduit. Le titre de transport Abidjan-Duékoué coûte 6000 F
Cfa, au lieu de 8000 F Cfa, dans les compagnies de transport de cars.
Néanmoins, le ferronnier, ne cache pas qu’il a quelques appréhensions. «Je suis
inquiet, mais je suis obligé de faire avec. Depuis quelques mois et surtout
avec l’inauguration de la nouvelle autoroute du nord, les fréquents accidents
sont causés par les chauffeurs de Massa. Je me confie à Dieu et j’espère que
les choses vont bien se passer», assure notre interlocuteur.
Interrogé, Diomandé Moussa, responsable d’une
compagnie de transport jure la main sur le cœur que tout son parc auto
bénéficie d’une assistance technique régulière. «Nos véhicules sont contrôlés
toutes les semaines par nos mécaniciens. On vérifie tout avant de lancer un
véhicule. Les chauffeurs ont droit à un temps de repos, en fonction du nombre
de voyage. C'est-à-dire que si un conducteur fait deux jours successifs de
voyage, alors il a droit à deux jours de repos », justifie-t-il. Selon ses
dires, régulièrement, il déconseille aux chauffeurs l’excès de vitesse et
l’usage du téléphone au volant. « Nous sommes clairs avec nos chauffeurs. Celui
qui viole les consignes de sécurité sera sanctionné. Pour contrôler
l’application de cette mesure, nous demandons aux clients de nous signaler
toutes les anomalies constatées au cours du voyage. Les passagers se plaignent
de moins en moins du comportement de nos conducteurs. Cela prouve que les instructions
sont suivies à la lettre», indique-t-il.
Un avis qui est loin d’être partagé par les
usagers de l’autoroute du nord et des techniciens de la sécurité routière.
On
vend la liqueur et la drogue dans les gares routière
«(…) Je vous assure que
les conducteurs sont des drogués et des soulards. Cela coûte combien au
ministre Hamed Bakayoko de prendre un arrêté interdisant la vente de liqueurs
aux abords des lieux de chargement des véhicules? Ce n'est pas la vie d'une
seule personne qui est en jeu, mais ce sont des milliers de personnes qui sont
en danger. Un chauffeur qui est soûlé n'est pas lucide. Donc, il perd
facilement le contrôle de son véhicule. Il n'existe pas d'alcooltest pour faire
le contrôle de routine. Les gens sont livrés à eux-mêmes », déplore Mlle Koné Maférima, jointe par téléphone le 28 janvier. Selon la présidente de l’Organisation
des jeunes ivoiriens pour la sécurité routière (Ojiser) sa structure continue
de sensibiliser les conducteurs à travers des rencontres de proximité dans les
différentes gares routières. Elle précise que la sécurité routière, notamment
lors des travaux de prolongation de l’autoroute du nord, n’a pas été prise en
compte. Cela se matérialise par l’absence de barres de sécurité pour séparer
les deux voies à deux chaussées. « Il faut remédier au plus vite à cette
situation, en y installant des barres de sécurité. Le ministère du Transport
doit réguler les véhicules autorisés au transport en commun. Nous avons
interpelé le ministère du Transport pour qu’il mette à la disposition de la
police des alcooltests pour contrôler le taux d’alcool dans le sang. Nous
allons continuer la sensibilisation. Tout le monde doit s'impliquer dans cette
lutte contre les accidents. », préconise-t-elle. « C'est un problème
commun. Nous faisons des plaidoyers dans ce sens. Mais vous savez, nous ne
sommes qu'une Organisation non-gouvernementale. Ce sont les pouvoirs publics
qui doivent prendre des sanctions à l'encontre de ceux qui ne respectent pas
les lois en matière de sécurité routière. Nous n'avons pas la compétence pour
prendre des décisions. Nous faisons des plaidoyers auprès des décideurs »,
insiste la présidente de l’Ojiser. Ses propos sont soutenus par Koné Issa,
responsable d’une autre Ong dénommée Sos piétons, spécialisée dans la sécurité routière.
« Nous savons pertinemment que l'autoroute du nord telle que nous l'avons
pratiquée, il y a beaucoup d'insuffisances dans la réalisation de ce
chef-œuvre. Nous félicitons le président de la République pour la réalisation
de ce projet, mais il faut reconnaître que les techniciens ne se sont pas
inspirés des autoroutes occidentales », critique-t-il. « Nous ne
sommes pas satisfaits du fait qu'on a des voies en continu sans aucun virage;
il n'y a pas de barres de sécurité. Nous avons constaté qu'il y a beaucoup
d'insuffisances sur l'autoroute du nord. La preuve est là aujourd'hui. On a des
accidents en cascade. Il faut installer ces barres de sécurité pour obéir aux
normes de la protection civile », prescrit le président de Sos Piétons.
Pour Dramane Sangaré, président
du syndicat autonome pour le regroupement des transporteurs de Côte d'Ivoire
(SagtCI), il y a deux facteurs à prendre en compte dans la réalisation d'un
accident de la circulation. «On a la
pneumatique. Il y a aussi la mauvaise formation des chauffeurs. Nous sommes
souvent choqués de voir certains enfants qui n'ont pas l'âge pour obtenir un
permis de conduire de véhicule de transport en commun conduire. Ces gamins se
retrouvent au volant des véhicules. Le gouvernement doit mettre fin à cette
situation dans les auto-écoles. Nous dépensons des millions FCfa pour acheter
des véhicules. Nous sommes affligés de voir vos véhicules transformés en
cercueils », s’indigne-t-il. Adama Touré, président de la coordination nationale
des gares routières de Côte d'Ivoire (CngrCI) abonde dans le même sens. Il
explique qu’il existe un problème lié aux minicars appelés communément "Massa".
« Ce sont des véhicules de marque Mercédès de 18 à 26 places. En réalité,
ce sont des fourgons dans les usines de construction de véhicules. Nous avons
eu la chance de visiter ces usines à l'extérieur. Quand nous sommes arrivés à
l'usine de construction de Mercédès, nous avons été surpris. Le Massa que nous
utilisons pour transporter les gens n'est pas conçu pour faire le transport en
commun. C'est un fourgon qui doit prendre des cartons. Le tonnage est limité à
1000 kilos. Ici, on se retrouve à 2,5 tonnes, y compris les passagers »,
analyse le transporteur. D’après lui, les véhicules de transport en commun sont
censés avoir un châssis. Il s’agit, selon ses explications, d’un
cadre rigide ou mobile fait d'une matière résistante, destiné à entourer ou
supporter le véhicule et protéger les occupants de la voiture. «Le
"Massa" n'a pas de châssis. L'homologation n'est rien d'autre que du
racket. On ne doit pas homologuer un "Massa" pour faire du transport.
Le "Massa" est comme une voiture de particulier. Elle a le même
moteur que la "Mercédes 300". Donc, vous comprenez pourquoi il roule
vite», conclut notre interlocuteur. Aussi, fait-il savoir, le troisième
problème se trouve sur le plan de la pneumatique. D’après lui, les pneus utilisés
par ces minicars sont non-conformes aux véhicules de transport en commun. « C'est
le même pneu qu'on met sous une "Mercédès 300". Nous avons souhaité
que le ministère des transports fasse les états généraux pour que nous
puissions sortir ces vrais problèmes. Il faut trouver la formule pour retirer
les "Massa". Ils ne doivent plus faire les longs courriers. (…) Il ne
faut pas laisser les "Massa" desservir ces lignes. Sinon, on ne
cessera jamais de compter les morts. Dotés de moteur d’une Mercédès série 300,
ces véhicules roulent entre 120 km/h et 140 km/h sur l’autoroute. Alors que la
vitesse autorisée est de 100 km/h. On a 257 "Massa" présents
uniquement sur l'axe Abidjan-Daloa. Nous avons un recensement non exhaustif. On
a dénombré 8000 véhicules de type "Massa" qui roulent sur nos routes.
Si l'Etat ne trouve pas les moyens pour faire changer ces véhicules, alors nous
allons continuer de compter les morts. Le système de freinage des véhicules
Massa est le même qu'une voiture de type particulier. Or c'est un véhicule de
2,5 tonnes qui se déplace, donc lorsqu'il freine, il perd l'équilibre et c’est
l’irréparable qui se produit», fait observer le leader syndical. Le 30 janvier,
nous nous sommes rendus à Star Auto, le concessionnaire de la marque Mercédès à
Marcory-Zone 4.
Les
explications techniques
Mme Brou Josiane,
responsable de la communication et du marketing et Adigbo Sibailly, responsable
technique, précisent qu’il existe pour le modèle "Sprinter", trois types de véhicules. « Il y a les
véhicules destinés au transport des passagers. On a une autre catégorie qui
transporte des marchandises légères. Il y a des véhicules qui transportent des
marchandises lourdes. Ce qui se passe, c'est que la plupart des véhicules sont
des véhicules importés. Donc, ils ne passent pas à Star Auto. Les clients achètent
ces véhicules. Mais ils ne savent pas que c'est compartimenté en trois séries.
Celui qui veut faire le transport doit faire venir la version
transport-passager », explique Mme Brou. Le responsable technique indique
que la différence entre ces
catégories d’automobiles se fait dans l'exécution par rapport aux marchés sur
lesquels ils sont utilisés. « Quand nous commandons un véhicule, nous
faisons une exécution c'est-à-dire que c'est l'ensemble des équipements qu'on
met dans le véhicule. Pour un Sprinter donné, nous mettons des équipements à
l'intérieur. Pour notre marché, nous mettons certains équipements qui ne sont
pas utiles pour le marché européen, par exemple. Prenons le cas du marché
ivoirien. Nous mettons la barre stabilisatrice, systématiquement, sur tous nos
véhicules. On va parler des amortisseurs qui sont renforcés », assure le
spécialiste. Il se trouve que, poursuit-il, les Sprinter importés présentent des équipements non adaptés au marché local. « Pour
transporter des marchandises moins lourdes, alors on va mettre des pneumatiques
très petits. On va tenir compte pour chaque pneumatique de l'indice de vitesse.
Cela veut dire que pour chaque pneumatique, il y a certes un chiffre, mais il y
aussi une lettre qu'on met qui est l'indice de vitesse. Donc en fonction de
l'utilisation, les pneumatiques sont adaptés. Alors, si les gens vont acheter
des Sprinter en occasion, ils auront des véhicules dont les pièces seront
adaptées pour un Sprinter qui était destiné pour transporter des matelas ou
d'autres marchandises légères. On va se rendre compte que ces Sprinter n'ont
pas d'amortisseurs renforcés. Une seule lame ressort pour la suspension. Alors
que nous, on en met suffisamment pour que cela puisse tenir le plus longtemps
possible, car on va transporter 18 personnes, ce qui fait 1,35 tonne en raison
d'une moyenne de 75 kg par personne. », indique-t-il. « Nous, on
renforce ces suspensions et ces amortisseurs qui permettent, quelles que soient
les routes, de pouvoir supporter. Malheureusement, ces véhicules de transport
en commun achetés en occasion n'ont pas ces équipements dont j'ai parlé un peu
plus haut. Ce sont des exécutions qui ne sont pas adaptés à notre marché. C'est
une erreur grave », martèle notre interlocuteur, en présence de la
directrice de communication et de marketing. Celle-ci n’hésite pas à
interpeller les gouvernants. « L’Etat doit vérifier ces véhicules qui
rentrent, s'ils respectent les normes de circulation de notre environnement.
Nous faisons des démarches auprès des pouvoirs publics parce que cela n'honore
pas. Quand un véhicule rentre, nous avons des spécialistes comme la Sicta (Société ivoirienne de contrôles techniques automobiles et industriels, ndlr) qui
sont à même de savoir que tel véhicule ne doit pas être autorisé à circuler sur
la route », fait savoir Mme Brou. Pour le responsable technique du
concessionnaire de la marque Mercédès, en réalité, le moteur ne peut pas être
un facteur, dans la réalisation d’un accident de la circulation. « Il peut
être un facteur de panne qui va se matérialiser par l'immobilisation du
véhicule. Par exemple, le modèle 311 qui est un moteur de 110 chevaux. C'est un
véhicule normal. Nous mettons un limiteur de vitesse dans tous nos véhicules.
Nous avons la possibilité de limiter la vitesse à 90 km/h ou à 110 km/h. Ce
sont des bridages électroniques. Les véhicules qui viennent en occasion
notamment les Sprinter, nous ne savons pas quel est le type de moteur qu’ils
ont, dans la mesure où ils échappent à notre contrôle. Certes, notre image est
écornée, mais nous ne sommes pas les seuls. Il y a d'autres marques de véhicules
qui sont importés dans les mêmes conditions. Personne ne peut contrôler cela,
car la Côte d'Ivoire est un marché ouvert», relativise l’expert en maintenance
automobile. Par ailleurs, il soutient que la Sicta voit ces automobiles
importés, lors des visites techniques. « Elle doit être capable de dire
que ces véhicules doivent normalement rouler à 100 km/h, or les pneumatiques
que l'utilisateur a mis ne sont pas adaptées. Prenons un cas. Si l'indice de
vitesse est la lettre F, cela veut dire que le véhicule doit limiter à 80 km/h.
Si le chauffeur roule à 110 km/h, il va rouler normalement, mais il n'est pas à
l'abri de l'explosion du pneu, car la pneumatique est fabriquée pour rouler à
80km/h. C'est un élément fondamental. Malheureusement, on ne tient pas compte
de cela très souvent, au cours des visites techniques », analyse-t-il. Xavier Hoenen, directeur des opérations de la Sicta balaie du
revers de la main ces incriminations.
A en croire le
directeur des opérations, qui avait à ses côtés Bini Roger, responsable
technique, Alban Koffi, directeur juridique et Olga Patricia Kili, responsable
qualité, il n’y a pas de disposition particulière, lors de la visite technique
des véhicules de transport en commun. Selon lui, il vérifie tous les éléments
relatifs au contrôle visuel c'est-à-dire le numéro de châssis, l'état de la
carrosserie. Il en fait également de même pour les éléments visibles à
l'intérieur et à l'extérieur du véhicule. « Nous contrôlons les attaches
de ceinture; la présence de tous les organes nécessaires au bon fonctionnement
du véhicule. Les engins sont soumis à des bandes d'essais, de freinage, des
bandes pour les amortisseurs, l'éclairage. On vérifie tous les organes qui sont
en dessous du véhicule. Il s'agit des suspensions, l'état du réservoir. A cela
s'ajoute des dispositions propres aux véhicules en commun. Il y a les
aménagements, le nombre de sièges, la taille des sièges, les largeurs de
passage minimal. En règle générale, cela prend une vingtaine de minutes. Tout
véhicule de transport est tenu d'avoir une carte de transport qui l'autorise à
faire du transport en commun. (…) Nous ne sommes plus responsables du véhicule,
dès qu'il sort de notre station. », se dédouane-t-il. « Il peut
arriver que l'utilisateur loue des pièces et des organes pour venir faire sa
visite. Notre certificat mentionne qu'au moment ou le véhicule s'est présenté,
il était en bon état. Nous ne sommes plus responsables de ce qui va se passer,
à la sortie de notre station. Cela relève de la responsable du transporteur»,
se défend-il.
Ouattara
Moussa
Lég
1 : L’autoroute du nord est devenue un cimetière à ciel ouvert….
Lég
2 : Dans la mesure où les barres de sécurité sont absentes, notamment au
PK 42.
Encadré 1 : 68 tués et 90
blessés graves sur l’autoroute du nord
Selon le Centre de
coordination des transmissions et des opérations (Ccto) du Groupement des
sapeurs-pompiers militaires (Gspm), du 7 décembre dernier au 11 janvier 2014,
68 personnes ont été tuées dans les accidents de la circulation sur l’autoroute
du nord et l’on a enregistré 90 blessés graves. D’après le Ccto, les minicars
communément appelés "Massa" sont impliqués à 80% dans la réalisation
de ces sinistres. Ainsi, le samedi 7 décembre dernier a été un week-end funeste
sur l’autoroute du nord. Cissoko Sidi, Koné Ansata, Ahouré Niangoran Adéle
et seize autres voyageurs ne reverront
plus jamais les siens. Ils ont été tués, ce jour-là, sur le coup, dans
l’accident de la circulation, à 8 heures 41 minutes. Le sinistre s’est produit
au PK 70, à cinq kilomètres, avant Elibou, dans le sens Abidjan-Yamoussoukro.
Selon les témoignages, des travaux entrepris sur l’autoroute du nord avaient
contraint les usagers à partager une seule chaussée à deux voies. Ne tenant pas
compte de cette nouvelle donne, le conducteur
du minicar de marque "Massa" immatriculé 9493FL01 roule à vive
allure. Il aurait tenté de faire un dépassement sur un car de transport en
commun de marque Daf immatriculé 5267GA01. La manœuvre tourne au drame. Le
minicar percute l’autre véhicule. On déplore seize morts sur le coup. La série
noire a continué le lendemain, à 6 heures 05 minutes. Toujours sur l’autoroute
du nord. Cette fois-ci, au PK 30, à quelques kilomètres, avant Attinguié. Un
camion remorque percute un minicar de transport en commun. Dix passagers sont
tués sur-le-champ. On a enregistré six blessés graves. Ils ont été transportés
par un équipage du Gspm au Chu de Yopougon.
Le lundi 9 décembre, l’hécatombe se poursuit sur l’autoroute du
nord. 29 voyageurs ont péri, vers 11 heures, dans un autre grave accident de la
circulation, à cinq kilomètres de Zianouan et à 103 kilomètres de la capitale
économique, dans le sens Abidjan-Yamoussoukro. Le conducteur du véhicule de
transport en commun communément appelé "Massa", immatriculé 515FY01,
a percuté un camion-remorque de 32 tonnes, chargé de marchandises. On a déploré
quatre morts dont une femme et dix-sept blessés graves, selon le Centre de
coordination des transmissions et des opérations (Ccto) du Groupement des
sapeurs-pompiers militaires (Gspm). Les témoins indiquent que le système
de freinage du minicar aurait lâché et que l’une des roues du véhicule de 18
places aurait explosé. Le mardi 10
décembre, encore un minicar à destination de San-Pédro fait une sortie de route
sur l’autoroute. A la suite d’une crevaison, le conducteur roulant à vive
allure fait une sortie de roue, entraînant plusieurs tonneaux. On ne déplore
aucune perte en vie humaine, mais l’on enregistre 16 blessés graves évacués par
un équipage du Gspm au Chu de Yopougon.
Leur pronostic vital n’était pas engagé. Le mercredi 18 décembre, deux
accidents de la circulation se sont produit dans le sens Toumodi-N’Zianouan. On
a déploré seize victimes dont six passagers tués sur le coup et dix blessés
graves. L’accident s’est déroulé à 14 heures 30 minutes. Là encore, selon les
témoignages, les roues arrière des véhicules auraient explosé. Déséquilibrés,
les conducteurs ont perdu le contrôle de leurs engins. Une heure après ce
sinistre, c'est-à-dire à 15 heures 30 minutes, un seconde accident est signalé
au même endroit. Toujours des véhicules de transport en commun de type Massa
sont mis en cause dans ces accidents. On a enregistré 22 victimes dont une
passagère tuée. Le 11 janvier, Mme Kadiatou Lehila Sylla a été tuée sur le
coup. En plus de la fille de maire d’Adjamé, deux occupants à bord du véhicule
de type 4x4, à savoir Sidibé Seydou le chauffeur et Ouattara Anzoumana, chargé
de la sécurité, sont aussi morts. L’accident de la circulation s’est produit à
110 kilomètres, sur l’autoroute du nord, dans le sens Abidjan-Yamoussoukro. Le
29 janvier, deux véhicules de 4x4 se sont percutés. Bilan : deux personnes
tuées sur le coup. Autant de drames qui font de la sécurité sur cette route,
une question d’intérêt national.
OM
Encadré 2 :En
attendant l’ouverture de la caserne de N’Zianoua
Le patron du Groupement
des sapeurs-pompiers militaires (Gspm) souligne que la caserne de
N’Zianoua est une entreprise privée. « Elle a été construite par la
fondation Petroci. Au moment venu, elle va offrir à l’Etat la caserne. A partir
de cet instant, nous allons l’armer en hommes et en matériels pour qu’elle soit
fonctionnelle. Malheureusement, je ne peux pas vous en dire plus. Bien que nous
participons aux différentes réunions pour veiller aux respects des
recommandations de sécurité contenues dans le cahier de charge », nous
apprend le colonel Issa Sakho. Toutefois, il précise que pour l’organisation
des secours, en ce qui concerne l’autoroute du nord, cette voie internationale
a été scindée en deux. « Si un accident ou tout autre sinistre se déroule
avant Singrobo, c'est-à-dire à 120 kilomètres d’Abidjan, explique-t-il, alors
nous faisons partir des équipes de la Première compagnie (Indénié, ndlr) ou des
hommes de la Quatrième compagnie (Yopougon, ndlr). » Le commandant du Gspm
indique que si l’accident a eu lieu après Singrobo, alors ce sont nos éléments
de la Cinquième compagnie (Yamoussoukro, ndlr) qui interviennent.
OM
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