Ouata Babacar, directeur de l'administration pénitentiaire
«Une force spéciale sera
créée pour les prisons»
Un mois (29 octobre- 28
novembre) après sa prise de fonction, le nouveau directeur de l’administration
pénitentiaire annonce, dans cette interview exclusive qu’il nous a accordée, la
création d’une brigade spéciale d’intervention rapide pour contrer toute
tentative d’évasion.
Combien de prisons compte la Côte d'Ivoire ?
Il y a actuellement 33 prisons dont la plus grande est celle
d'Abidjan (Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan, ndlr). Chaque tribunal a
une grande prison. Chaque section de tribunal possède également une prison. On
a ouvert les tribunaux de Sinfra et de Guiglo. La construction des prisons de
ces deux villes va se faire éminemment.
Les prisons existantes suffisent-elles ?
Il faut savoir que les prisons sont reliées aux juridictions.
Nous avons 35 juridictions actuellement. Alors nous devons avoir en principe 35
prisons. C'est vrai, dans le passé, au
niveau de la communauté européenne, on avait des prisons où on pouvait déporter
de grands gangsters et de grands criminels. Mais cette façon de procéder n'a
plus court. Les prisons sont liées aux juridictions. Donc il faut autant de
prisons que de juridictions. Si on doit étendre les pénitenciers, il faut qu'on
adopte l'ancien système. Il consiste à
créer des camps pénaux. Ces prisons spéciales recevront les criminels les plus
dangereux. Ces maisons spéciales vont pouvoir recevoir un certain nombre de
détenus dont les critères seront arrêtés. Sinon dans le principe, c'est que
chaque prison correspond à une juridiction.
Cela veut dire qu'il faut
d’autres prisons ?
Il faut en construire
d'autres. L'Etat a prévu en faire une dizaine dans les années à venir. Au
niveau du ministère de la construction et de nos services, un comité paritaire
est en train de faire des études sur la faisabilité de ce projet pour sortir
les coûts et bien d’autres données. Nos partenaires internationaux comme
l'Union européenne; l'Onuci (Opération des nations unies en Côte d'Ivoire,
ndlr), ont aussi décidé de nous aider pour la construction de ces nouvelles
maisons d’arrêt et de correction. Des études sont en cours sur la prison de
San-Pédro. Concernant la construction du pénitencier de Guiglo, l'Onuci est en
train de voir la faisabilité. Elle s'attèle aussi à aménager le Com d'Abidjan (Centre
d'observation des mineurs, ndlr). Il s'agit de faire sortir les mineurs de 18
ans du milieu carcéral des majeurs.
Quelle est la capacité d'accueil de la Maison d'arrêt et de
correction d'Abidjan (Maca) ?
C'est une maison qui a été construite pour 1500 places. A la
date d’aujourd’hui (jeudi 28 novembre, ndlr), nous sommes à plus de 4000 prisonniers.
Nous sommes en surpopulation. Mais ce n'est pas la seule prison qui est
surpeuplée. Presque toutes les maisons d'arrêt et de correction des tribunaux
de l'intérieur du pays vivent la même situation. Nos prisons sont surpeuplées.
Cette surpopulation carcérale n’est-elle pas liée à
non-respect des normes de construction d'une prison?
Vous avez raison. En ce qui concerne l'occupation de
l'espace. Nous avons deux mesures. Il y a une norme qui tient compte d'une
capacité de 5 mètres carrés par détenu. Le prisonnier est
alors dans les conditions idéales de vie et de respect de sa dignité. D'autres
prisons vont jusqu'à 2,5 mètres carrés d'espace de détention. Jusque-là les
normes sont respectées. Le prisonnier peut avoir un espace où il peut déposer
sa literie, sa table et éventuellement sa chaise de travail. Mais en deçà de ces
chiffres, on tombe dans la surpopulation. Et la plupart de nos prisons sont
dans cette catégorie où les matelas s'empilent les uns sur les autres.
La construction de dix
nouvelles maisons d’arrêt et de correction peut-elle résoudre le
problème ?
Oui. Cela va permettre de faire de la place dans les prisons.
On va déporter vers ces maisons d'arrêt et de correction les détenus les plus
dangereux. Il faut ajouter à cette liste les bagnards qui ont de longues peines
d’emprisonnement; les détenus qui ont commis un certain nombre d'infractions
qui seront déterminées. Cela va faire de la place dans les autres prisons de
sorte que les pensionnaires auront beaucoup plus d'espaces vitaux. La
construction de ces nouveaux pénitenciers va désengorger les prisons existantes.
Peut-on savoir les villes retenues pour accueillir les
nouvelles prisons ?
Nous aurons trois
nouvelles prisons à Abidjan. Nous sommes en train de construire le tribunal de
la commune d'Abobo qui doit avoir une prison. Il y a aussi le tribunal de
Port-Bouët qui va avoir son pénitencier. Nous allons construire également une
maison d'arrêt et de correction à Bingerville. A l'intérieur du pays, nous
avons Sinfra, Guiglo et 4 autres villes. En somme, il y a 6 villes de
l’intérieur du pays qui ont été retenues dans le cadre du projet de
construction de ces nouvelles prisons.
Trois mille détenus ont bénéficié de la grâce présidentielle,
en septembre dernier. Combien de personnes ont-elles déjà été libérées ?
Nous avons libéré tous ceux qui n'avaient pas formé appel de
leur décision. Ils sont tous sortis de prison. Il reste certains prisonniers
qui ont interjeté appel de leur décision et pour lesquels la cour d'appel est
en train de traiter les procédures. Ça va vite parce que ce sont des procédures
en urgence. Avant la fin décembre (2013, ndlr), tous les prisonniers graciés
seront dehors. A la date d'aujourd'hui (28 novembre, ndlr), nous sommes à 2600
détenus bénéficiant de la grâce présidentielle qui sont sortis des 33 prisons de la Côte d'Ivoire. Ils ont été
incarcérés pour des délits mineurs: abus de confiance, violation de domicile,
coups et blessures volontaires.
Les gardes pénitentiaires dénoncent le manque de moyens pour
accomplir leur mission de sécurisation des prisons et des détenus. Quelles
réponses pouvez-vous donner ?
A ce niveau, il faut qu'on l'éclaircisse l’opinion. Parmi les
agents pénitentiaires, il y a des gardes qui sont en contact direct avec les
détenus. Ce sont les agents d'encadrement. Ces agents à l'intérieur de la
prison ne doivent pas porter des armes. Parce que ces armes peuvent servir à se
retourner contre eux-mêmes si les détenus les leur arrachent. Il y a également des
gardes pénitentiaires qui sont chargés, en principe, d'assurer la sécurité
péri-métrique de la prison. Ces gardes sont dotés en armes. Les éléments qui
sont censés être dans les miradors doivent être fournis en armes. Avant la
crise postélectorale (décembre 2010 à avril 2011, ndlr), toutes les prisons
avaient des armes. La Maca avait une trentaine d'armes à feu. A la faveur de la
crise, toutes ces armes ont été emportées. Le pays étant sous embargo, il n'est
pas facile pour l'Etat de trouver des armes et les remettre à la disposition de
ceux qui doivent les utiliser. L'Etat essaie, tant bien que mal de se fournir
en armes. Nous avons reçu une dotation de dix kalachinikovs. Nous allons les
repartir sur les prisons les plus sensibles comme celle de Saliakro (Dimbokro, ndlr) qui est un
champ pénitencier et celle de Yopougon (Maca, ndlr). Au-delà de cela, tant que
nous n'avons pas de dotation d'armes, les gardes vont travailler avec les
moyens qu'ils ont. Mais la plupart des maisons d'arrêt et de correction ont au
minimum une arme. Même si ce n'est pas suffisant nous faisons avec ce que l’Etat
nous donne le temps que l'embargo demeurera.
Ils redoutent d'être la cible d'attaques pendant le convoyage
des détenus.
Je suis entièrement d'accord avec eux. Normalement, cette
fonction n'est pas réservée aux gardes pénitentiaires. C'est une mission
confiée à la police et à la gendarmerie. C'est dans le dysfonctionnement de nos
activités que nous les réservons aux gardes pénitentiaires. Nous sommes chargés
de recevoir le détenu que le parquet et le juge d'instruction nous envoie.
Notre mission est de le garder et de le mettre à leur disposition avec des
ordres de transfèrement. Au-delà, notre responsabilité n'est pas engagée. Par
méconnaissance des textes, nos gardes sont obligés de convoyer les détenus
jusque dans les différentes prisons avec le manque d'armes. C'est effectivement
dangereux. Mais nous envisageons, si cette politique était admise par nos
autorités supérieures, mettre en place une brigade d'escorte et de sécurité.
Elle va comporter des éléments formés par nos forces de l'ordre. Elle aura sa
dotation en arme pour faire en toute sécurité l’escorte. Cette brigade va
assurer la sécurité péri-métrique des prisons, mais aussi dans les cellules des
détenus. Nous comptons avoir aussi une brigade d'intervention rapide. Elle aura
pour mission de dénouer toute crise pénitentiaire, toute mutinerie
pénitentiaire. La brigade d'intervention rapide va permettre de lancer des opérations
de fouilles massives et ponctuelles dans les pénitenciers. C'est une force
spéciale de la maison pénitentiaire. Nous avons cela en projet. Nous voulons
aussi mettre en place une brigade de surveillance qui est le travail normal de
nos gardes. Et puis, une brigade de police qui va permettre de faire des enquêtes
sur des faits infractionnels qui sont commis par nos agents ou par les détenus
ou entre les détenus ou encore entre les prisonniers et leurs parents ou bien
entre les agents et les parents de détenus. En somme, tout ce qui va concerner
les faits infractionnels de nos cités. Cette brigade va se charger de mener la
première enquête avant de le déférer devant les autorités de polices
judiciaires.
Intertitre 1 :
«Nous allons construire trois nouvelles prisons à Abidjan »
En attendant, les
gardes pénitentiaires réclament des primes de risques que répondez-vous ?
Cette question de prime est liée aux différents textes
réglementaires qui régulent la fonction de garde pénitentiaire. Il s'agit d'un
problème d'interprétation des textes. En réalité, les geôliers sont des corps
paramilitaires comme les autres corps tels que la douane, les eaux et forêts et
la police. Ces corps ont des primes qui ont été fixées par leurs différents
textes spéciaux. En ce qui concerne les gardes pénitentiaires, un texte vient
aussi fixer ces primes. Ils veulent simplement que cela soit harmoniser sur
tous les autres corps. Ils se sentent comme des laissés-pour-compte. Des
démarches sont en train d'être fait. Le ministre Gnénéma Coulibaly a pris fait
et cause pour eux. Il entend saisir les autorités qui peuvent donner une
réponse pour trancher la question. Nous sommes en train de préparer les textes
pour que cela remontent à ces autorités.
Il y a une polémique sur leur dénomination. Les geôliers
estiment qu'on doit les appeler police pénitentiaire. Où se situe la vérité ?
Cette appellation provient du fait qu’ils ont été formés par
la police. Quand on recrute un contingent d'agents pénitentiaires, c'est la
police qui se chargé de leur formation. Ce n'est pas une dénomination
officielle. Cette dénomination ne leur sied pas. Elle ne se trouve dans aucun
texte. Elle n'existe même pas dans notre jargon. C'est parce qu'ils ont été
formés à la police. Ils ont bien aimé cette désignation. Sinon, ce sont des
agents d'encadrement; des contrôleurs pénitentiaires et des attachés pénitentiaires.
Il y a un corps d'administrateur pénitentiaire qui sera créé bientôt.
L’on a assisté à des évasions à répétition cette année. Quel
est le problème ?
Il faut dire que tout n'est pas le fait des agents. Les
évasions proviennent aussi de la vétusté de nos bâtiments. Il y a des maisons
d'arrêt et de correction où il suffit de soulever la tôle pour se retrouver
dehors. Il y a des prisons où il n'y a pas de clôture. Ce qui sert de clôture
ce sont les habitations qui sont autour de cette prison. Nous avons des maisons
d'arrêt où les clôtures n'ont pas de mirador. Les gardes sont à même le sol.
Ils ne peuvent pas savoir ce qui se passe sur une toiture. En général, c'est au
cours des pluies que ces évasions ont eu lieu. On n'entend pas le bruit des tôles
qui sont en train d'être défoncées. Donc, c'est facile pour ces détenus de
partir. Concernant la Maca, le problème des évasions est lié à un mal vivre.
Parce que le détenu est un homme de la société qui, à un moment donné a fauté.
Il s'est retrouvé incarcéré pour subir la sanction que la société a voulu bien
lui donner afin qu'il puisse s'amender. Mais le traitement qui est infligé aux détenus
n'est pas de leur goût. Ils estiment qu'être dehors est préférable. Ce qu'ils
pensent c'est s'en allé. Le prisonnier, tout ce qu'il a à cogité, c'est comment
sortir de la prison par la voie normale ou par la voie extraordinaire qu'est
l'évasion. Il nous appartient de les devancer dans leurs réflexions. J'ai dit à
mes régisseurs que s'ils veulent savoir comment contrer ces évasions, ils
doivent être proches des prisonniers. Nous ne pouvons pas être loin d'une
maison et savoir ce qui se passe dans cette maison. Ils sont chargés de leur
surveillance. Ils doivent donc penser comme eux. Ils doivent les connaître dans
leur attitude et dans leur caractère. Cela veut dire qu'ils doivent être
proches de ces détenus. Ils doivent les avoir sous les yeux et avoir une
surveillance constante. La seconde étape, c'est de faire des rondes. Le travail
étant toujours le même, il s'installe quelquefois de la lassitude, des
reflexes, de la monotonie. A la fin, ils ne sont plus concentrés sur leur
travail. Mais il faut chaque jour se remettre en cause. Il faut que la garde
soit bien assurée. Comme l'ont recommandé nos partenaires qui ont des
expertises à la matière, il faut compter les prisonniers. De sorte que
lorsqu’il y en a un qui n'est pas là
pendant une heure, il faut se demander où il se trouve. Il faut aller le
chercher. Donc, il faut connaître les détenus. Il faut être proche d'eux. Il
faut leur montrer que leur détention est une situation provisoire d’où ils sortiront. Le troisième élément
consiste à la réinsertion des prisonniers. La préparation à la réinsertion.
Quand le bagnard sait que la détention lui a permis d'avoir une activité qui va
lui permettre de se réinsérer dans la société, il n'a aucun intérêt à s'en
aller. Il attend de purger sa peine et d'apprendre suffisamment. Et à sa sortie
de prison, d'aller monnayer ce qu'il a appris. C'est l'un de nos combats avec
des partenaires internationaux comme l'Onuci qui est prête à nous accompagner.
Je sais que nous allons aller très loin dans ce combat.
En juillet, un incident s'est produit au parloir de la Maca
entre les geôliers et un groupe de prisonniers dont Coulibaly Yacouba alias
Yacou le Chinois. Une mutinerie pénitentiaire a été évitée de justesse. Quelle
est la procédure à suivre pour les visites de détenus?
Les visites rentrent dans le même cadre que la monotonie, la
lassitude et les mauvais reflexes qu'ont pris les agents dans le cadre de leur
travail. Normalement, le parloir est tenu par des gardes pénitentiaires. Mais
aujourd'hui, quand vous allez dans les prisons dont la Maca le parloir est
surveillé par des prisonniers. Ce qui n'est pas normal. Nous avons attiré
l'attention des uns et des autres pour que cela change. Ce changement n'est pas
totalement du goût de nombreuses personnes parce qu'il ne faut pas se le cacher
beaucoup de trafics sont faits à ce niveau.
De quels types de
trafic s'agit-il ?
Par exemple, lorsque le visiteur arrive au parloir de la
prison pour qu'on aille appeler son parent (détenu, ndlr), il doit payer un
droit de passe. Quand le parent du détenu se présente pour rentrer dans le
parloir, c'est un usage qui date de très longtemps, il paie de l'argent. C'est
pareil lorsque le coli alimentaire et vestimentaire arrive il faut aussi payer
un droit de passe. C'est ce trafic que certains gardes ne veulent pas voir
disparaître. Nous allons combattre ce trafic pour le faire disparaitre. Nous
avons déjà supprimé les frais de permis de communiquer. C'est-à-dire que
lorsque vous voulez aller visiter un parent emprisonné, auparavant, quand vous
arrivez à la Maca vous payez un droit de visite (1000 Fcfa et 2000F Cfa), sur
instruction du ministre de la justice, ce tarif a été supprimé. Nous irons plus
loin. Tout ce qui concerne les abus d'autorité à l'intérieur des prisons,
notamment les droits de passe, doivent
cesser définitivement. C'est une lutte que nous devons mener. Elle ne sera
facile parce qu'il y a des intérêts en jeu mais nous n’allons pas reculer.
Il existe aussi des réseaux de trafics de drogues alimentés
par des détenus. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
C'est l'un des gros problèmes de nos prisons. Il y a beaucoup
de trafics. A l'intérieur, c'est plus facile à juguler. Il suffit que le
régisseur soit vigilant en surveillant mieux ses hommes et les détenus pour
qu'on puisse ramener le trafic de drogue à un niveau très bas.
Intertitre 2 : «L'homosexualité est bien une réalité dans nos prisons. »
Et les cas de malnutrition ?
A ce niveau, c'est un problème de formation de nos
régisseurs. Nous avons en Côte d'Ivoire des aliments qui contiennent suffisamment
de vitamines, de sels minéraux, de protéines pour pouvoir remplacer l'aliment
que nous recherchons forcément pour donner à nos détenus. Nous avons des
aliments du terroir qui contiennent tous les nutriments nécessaires. Cependant,
nous sommes cadrés dans une alimentation figée. On donne du riz, des ignames,
du maïs. Cela est accompagné de feuilles issues de nos maraîchers, à un prisonnier qui est dans un état de stress et
un état moral défavorisant de se maintenir en bonne santé. C'est tout cela que
nous sommes en train de changer. Nous avons instruit pour que le budget de
l'année prochaine prenne en compte le petit-déjeuner et le déjeuner pour
équilibrer l'alimentation des détenus. Sur ce plan, nous avons l'appui
important du Cicr (Comité international de la croix rouge, ndlr). Le 4 octobre
dernier, nous avons fait un séminaire où nous avons formé les régisseurs quant
à l'alimentation qu'ils doivent donner à nos prisonniers. Le Cicr apporte aussi
des compléments nutritionnels pour enrichir l'alimentation pour pallier les cas
de malnutritions.
Qu'est-ce qu'un prisonnier doit manger?
Il faut une alimentation riche en protéines. Elle peut être
d'origine animale ou végétale. Il a aussi besoin de lipides et de vitamines A
et C. Le haricot est un aliment adapté qui nous donnons aux prisonniers. Il y a
aussi le soja et les ignames qui contiennent des féculents. Il faut trouver des
additifs en protéine animale. Même si ce n'est pas toute la semaine, mais il
faut au moins nourrir deux fois de façon normale les détenus. Cela est difficile
parce que la viande est chère. Les budgets que nos régisseurs ont ne peuvent
pas leur permettre de se donner ce luxe.
Combien coûte un détenu par jour ?
Le ratio international d'un détenu, en application de la loi
de 1932, c'est 1600Fcfa par jour. Nous avons fait nos calculs en tenant compte
de nos réalités pour qu'un homme mange normalement, il lui faut 600 Fcfa par
jour. Mais aujourd’hui, à cause de l'augmentation de la population carcérale,
nous nous retrouvons entre 350 Fcfa et 300 Fcfa pour un prisonnier par jour.
L'alimentation devient donc systématiquement insuffisante. Il faut des compléments
alimentaires. Les organismes internationaux nous aident dans ce sens en
attendant que les prochains budgets soient mis en place. Toutefois, l'Etat a
décidé de revoir à la hausse ce budget en nous accordant un excédent qui va
s'ajouter l'année prochaine (2014, ndlr).
Selon nos sources, l'homosexualité est répandue dans les
différentes cellules de la Maca tant au bâtiment des Femmes que chez les hommes.
Qu’en dites-vous ?
Ce sont des pratiques inhérentes à la nature humaines. Ce
sont des pratiques que les gens ont en dehors de la prison et avec lesquelles
ils s'introduisent dans le pénitencier. Ces personnes-là poursuivent leurs
pratiques dans la prison. Malheureusement, elles trouvent des gens qui
deviennent leurs victimes. En revanche, nous avons demandé aux régisseurs de
veiller à la santé mentale des détenus. C'est-à-dire d'être une écoute. De
sorte que lorsqu'un pensionnaire fait l'objet d'un harcèlement, quel que soit
le motif, qu’ils ne nous préviennent immédiatement. Nous avons des possibilités
de faire des transfèrements de prisonniers. Quand un détenu devient dangereux
pour une prison, nous pouvons le transférer dans une autre maison d'arrêt et de
correction plus sécurisée et mieux encadrée. Donc sur ce plan, les régisseurs
sont devenus plus conciliants avec les bagnards et ils sont plus à leur écoute.
Cela est déjà un moyen pour désamorcer ces questions. Il y a aussi le fait que
le manque d'alimentation appropriée amène certains prisonniers à se prostituer
pour avoir la pitance. En échange d'une relation sexuelle, il a de l'argent ou
de la nourriture. En général, cela se passe entre les hommes. C'est une
question de survie. En somme, en améliorant l'alimentation et les conditions de
détention peuvent servir à mettre fin à ce phénomène. L'homosexualité est bien
une réalité dans nos prisons. Il ne faut pas se voiler la face. Si on veut
lutter contre le fléau, il faut poser le diagnostic. Nous avons instruit les
régisseurs de veiller sur la question pour ramener le phénomène à un taux
réduit. Les régisseurs ont pris conscience. Ils travaillent dans ce sens. On
leur a confié des gens entièrement. De la manière ils entrent, ils doivent
sortir pareils. Nous sommes en train de leur inculquer cela comme reflexe.
Réalisée par Ouattara
Moussa
Lég 1 : Ouata Babacar annonce le début de la
construction de la prison d’Abobo.
Lég2 : Selon le patron des prisons, des gardes servent
de passoire aux réseaux de drogues.
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